Maladie cutanée d’origine inflammatoire chez le perroquet

par Manon Tremblay, DMV

Des maladies cutanées d'origine inflammatoire offriraient certains motifs de picage chez les perroquets.

Ces dernières années, à la longue liste des causes possibles de picage chez les oiseaux, s’est ajoutée la maladie cutanée d’origine inflammatoire.

Un oiseau qui souffre d’une maladie inflammatoire systémique (exemples: sarcocystose, allergie saisonnière ou non, PDD) peut voir l’inflammation s’étendre à sa peau. Les cellules inflammatoires qui s’infiltrent dans la peau occasionnent de la démangeaison plus ou moins intense. Certains oiseaux iront jusqu’à endommager leurs plumes et s’automutiler.

Le picage de certains individus peut donc être expliqué par la présence de cette inflammation. Une étude faite par Dr Garner sur 412 oiseaux pratiquant du picage a permis de déterminer que 51 % d’entre eux étaient atteints d’une maladie inflammatoire cutanée. La condition ne semble donc pas si marginale. Afin d’établir ce diagnostic, une biopsie doit être faite.

La biopsie pairée

Chez les oiseaux atteints de problèmes de picage avec ou sans automutilation, il est donc avantageux de pratiquer une biopsie cutanée. Mais la technique diffère quelque peu de celle pratiquée il y a quelques années. Ce n’est pas seulement le site affecté qui est biopsié mais aussi une zone où la peau est parfaitement en santé. Un morceau contenant une plume est donc prélevé à l’endroit où l’oiseau pratique son picage et un autre morceau semblable est pris derrière la tête. Cet endroit est inaccessible pour le bec de l’oiseau. Un pathologiste examine ensuite les tissus provenant des deux sites et détermine s’il y a de l’inflammation dans les deux morceaux (signe d’une maladie inflammatoire cutanée) ou seulement dans le prélèvement fait dans la zone mutilée par l’oiseau (inflammation secondaire au dommage fait par le bec). La biopsie pairée est donc un moyen peu invasif permettant de départager les cas de picages en deux groupes: traumatique (exemples: comportement, hormonal, nutritionnel, frustration sexuelle, etc.) ou inflammatoire (exemples: PDD, allergies de toutes sortes). La présence d’une inflammation dans les deux biopsies indique que l’inflammation est fort probablement la cause du picage.

Les amazones sont souvent atteints de maladies cutanées d'origine inflammatoires qui se manifestent entre autres 
				par du picage.

La particularité de certaines espèces

Dr Garner a pu déterminer, en examinant plusieurs biopsies, que les amazones et les aras étaient les plus souvent atteints de maladie inflammatoire cutanée alors que les cacatoès et les gris d’Afrique avaient très peu souvent de maladie inflammatoire cutanée pouvant expliquer leur picage. Chez les autres espèces observées (quaker, conure, éclectus, perruche calopsitte, perruche ondulée et caïque) il n’y avait pas plus de maladie inflammatoire de peau que d’inflammation traumatique.

Symptômes de la maladie inflammatoire cutanée

Outre le fait que les oiseaux souffrent de démangeaison et enlèvent ou endommagent leurs plumes, leur peau peut parfois sembler plus sèche et être de couleur rouge. Certains oiseaux s’automutilent au point d’atteindre le muscle sous la peau. De façon caractéristique, ces oiseaux se grattent même lorsque l’on tente de les divertir ou leur changer les idées. L’inconfort est réel et parfois les oiseaux sursautent, bougent frénétiquement les ailes ou vocalisent lorsqu’ils se grattent. Les symptômes peuvent apparaître à tout âge et peuvent durer toute l’année ou être saisonniers.

Les antihistaminiques offrent de bons résultats lors de picage causé par des maladies cutanées inflammatoires.

Pour contrôler une maladie inflammatoire cutanée, il faut viser à diminuer l’inflammation en utilisant au besoin des antihistaminiques (qui semblent donner de meilleurs résultats chez les aras), une alimentation hypoallergénique, éliminer le plus possible les allergènes de l’environnement (exemple: nicotine des cigarettes, etc.) et supplémenter la diète avec des suppléments réputés aider à contrôler l’inflammation. Un supplément d’oméga 3 et oméga 6 fonctionne bien.

Si une allergie alimentaire est suspectée, la moulée hypoallergénique de la compagnie Kaytee peut être essayée. Cette moulée faite à base de riz et contenant une bonne quantité de graines de lin peut aider à diminuer de façon significative l’inflammation cutanée et par conséquent les démangeaisons. L’oiseau qui répond à une diète hypoallergénique peut aussi consommer d’autres aliments peu antigéniques: saumon ou poulet cuit, épinards, kale, poivron vert, fève verte, cantaloup, fromage cottage, lentilles.

Alors, si votre oiseau fait du picage, ne sautez pas automatiquement à la conclusion qu’il souffre d’une maladie inflammatoire cutanée. La liste des causes de picage est très longue. Il faudrait donc que votre oiseau subisse d’autres tests avant de subir une biopsie pairée. Une simple coloration gram de ses selles donnera peut-être la réponse. La présence de mauvaises levures dans son intestin occasionne parfois de la démangeaison. Régler un cas de picage ça peut être très facile pour certains et vraiment complexe pour d’autres!

 

Références
Garner Michael M., Inflammatory skin disease in feather picking birds: histopathology and species predispositions. Proceedings AAV, 2006, p17-20
Clubb Susan L., Clinical management of feather damaging behavior associated with inflammatory skin disease in parrots, Proceedings AAV 2006, p. 73-77

 

 

© Manon Tremblay 2010

 

Photos
Jacquot, conure de Patagonie (cyanoliseus patagonus patagonus), Evelyne Wey
Paco, amazone à front jaune (amazona ochrocephala ochrocephala), Marie-Marcelle Laplace
Ara "arlequin", Julie Amyot