POURQUOI ON NE DOIT PAS TAILLER LES PLUMES DE VOL DE COCO... JAMAIS!

par Johanne Vaillancourt

Perroquet pleines ailes.

J’aimerais en finir avec l’idée préconçue que la taille ou non des plumes de vol n’est qu’affaire d’opinion ou de choix. Tailler les plumes de vol d’un oiseau le handicape bien plus profondément que vous ne pourriez le croire.

L'un des mythes les plus répandus dans le monde des oiseaux est que couper les plumes de vol d'un perroquet est temporaire et inoffensif, tout comme une coupe de cheveux. C’est malheureusement ce qu’on lit sur certains groupes.

Il est complètement ridicule de comparer la taille des plumes à une coupe de cheveux. Même si les plumes de vol repoussent (dans la plupart des cas), c'est là que s'arrête la similitude.

Je vais vous dire un secret: le fait de tailler les plumes de vol d'un oiseau, même légèrement, modifie la forme aérodynamique de ses ailes, ce qui affecte directement sa mobilité. Un perroquet compte sur ses ailes pour ses mouvements, son transport, son exercice et surtout sa sécurité. Nous ne comptons pas sur nos cheveux pour aucune de ces raisons n’est-ce pas?

Je vais vous confier un autre secret: il est erroné de penser que "puisqu’il n’a jamais volé ça ne lui manquera pas". Croyez-moi, s’il a peur, il s’envolera de façon réflexe et ne pensez pas qu’au moment de tomber lourdement sur le sol il ne réalisera pas qu'il lui manque quelque chose.

L’oiseau qui a les plumes de vol taillées SAIT PARFAITEMENT ce qu'il lui manque, même s'il n'a jamais volé auparavant, parce qu'il est programmé pour voler. UN OISEAU EST UN ANIMAL QUI VOLE.

Ce qui définit un perroquet ou n’importe quel animal aérien, c’est sa capacité de voler. Le vol est fondamental pour chaque composante de l'esprit et du corps d'un perroquet. Qui peut réellement s’imaginer qu’un animal qui a évolué depuis des millions d'années pour se mouvoir en volant peut demeurer en bonne santé mentale et physique si on l’empêche de le faire?

Les perroquets, qu'ils soient nés à l'état sauvage ou en captivité ont la même impulsion biologique à voler. Leur cerveau, leurs os, leurs muscles, leurs organes et leur corps entier sont structurés spécifiquement pour le vol.

Puisque le vol est utilisé comme moyen essentiel pour un oiseau d'échapper à des situations alarmantes (le premier mode de défense est la fuite), les oiseaux aux plumes taillées peuvent devenir plus craintifs et terriblement stressés s'ils ne peuvent pas prendre les mesures naturelles d'évitement dans l’immédiat et fuir les stimuli effrayants ou pire encore, simplement s'ils savent qu'ils ne peuvent pas échapper à l’objet de leur frayeur.

Les espèces qui volent ne font AUCUNE ADAPTATION À ÊTRE INCAPABLES DE VOLER. L’oiseau sait que s’il ne peut pas s’envoler, il devient très fragile à la prédation et court un risque imminent de mort.

Les perroquets qui ont la chance de pouvoir voler dans un contexte de captivité sont...
en meilleure santé
sont plus actifs
plus coordonnés
et ont une bien meilleure vision.

Apprendre voler est le comportement le plus compliqué et le plus important qu'un perroquet puisse apprendre. Le vol favorise l’intelligence, la confiance et l’estime de soi ce qui fait de l’oiseau qui vole un compagnon nettement plus sociable qu’un oiseau mutilé.

La préparation sérieuse pour le vol du perroquet de taille moyenne commence vers l'âge de trois ou quatre semaines. Le développement de voies neuronales du cervelet du très jeune perroquet est la première étape de la préparation au vol (le cervelet est une partie de l’encéphale qui joue un rôle important dans l’équilibre et la coordination des mouvements musculaires).

Ce processus commence la première fois que bébé commence à se déplacer dans le nid et est pratiquement terminé entre 4 et 6 mois. Chaque nouveau type d'activité physique programme plus de voies neuronales dans le cervelet. Le cervelet stocke le programme pour la coordination et fournit finalement les habiletés motrices pour le vol. Les voies neuronales sont les connexions électriques du cerveau qui permettent aux informations d'être transférées dans tout le corps.

Puisque plus d'expériences et plus d'activités conduisent à une meilleure coordination motrice en créant plus de voies neuronales, il va de soi qu'apprendre à voler en ajoute un nombre incroyable au cervelet.

Le cerveau du perroquet se développe selon un calendrier prédéterminé qui a été "finement réglé" par l'évolution au cours de millions d'années. Chacun des sens, ainsi que les compétences mentales et physiques se développent sur une période de temps, mais pas nécessairement en même temps.

Alors il est important de savoir que certaines des phases de développement sont symbiotiques, ce qui signifie qu'elles ont besoin d'informations en cours de développement dans une autre zone du cerveau pour leur propre développement optimal.

Par exemple, la vision se développe mieux lorsque le jeune peut se déplacer et voir les choses sous différents angles et distances; la coordination se développe mieux lorsque le cortex visuel peut fournir des informations sur la distance et la perspective. Sans cette relation symbiotique de vision et de coordination, il est difficile de développer une vision (perception) tridimensionnelle. Bref, les jeunes apprennent mieux quand une combinaison de sens est expérimentée en même temps.

Les sens de la vue et de l’ouïe donnent une conception très différente pendant le vol. Deux des nombreuses fonctions cérébrales importantes requises pour le vol sont la coordination et la vision et même si celles-ci se développent dans différentes parties du cerveau, elles sont essentielles pour le développement optimal de l’une et l'autre.

La coordination se développe dans le cervelet lorsque le petit se déplace et essaie à plusieurs reprises de nouvelles activités de plus en plus compliquées. Le cortex visuel du perroquet, qui est assez différent du nôtre, se connecte à pratiquement toutes les parties du cerveau aviaire.

La motricité et la vision sont, à certains égards, si intégrées l'une à l'autre qu'il est difficile de séparer les deux. Lorsque le jeune s’envole, il commence à associer les changements visuels à la réduction de la distance entre lui et l'objet. Au fur et à mesure que ses capacités motrices se développent, il commencera à anticiper un accident imminent et apprendra à ralentir.

Plus il vole vite, plus la capacité visuelle doit être rapide et plus le cerveau apprend à traiter les informations rapidement et plus vite encore il pourra voler.

Apprendre au cerveau à traiter les informations plus rapidement et à des niveaux plus élevés favorise une prise de décision plus rapide et moins d'erreurs dans tous les domaines de la compétence mentale, physique et sociale. Cette combinaison de compétences est très importante chez les perroquets, car ce sont des proies et ils doivent constamment être prêts à "réfléchir en vol".

Lorsqu’un oiseau n’apprend pas à voler, il n’apprend pas à traiter les informations assez rapidement et il se crée alors ce qu’on appelle des "réseaux de compensation". Ces réseaux de compensation se développent pour prendre des décisions rapides lorsque la socialisation et l'expérience ne sont pas suffisantes pour produire rapidement une décision éclairée. Les individus moins fonctionnels utilisent ces réseaux de compensation pour tirer des conclusions lorsqu'ils ne peuvent pas penser assez vite. Cela se produit souvent pour deux raisons: l'oiseau veut contourner ou éviter une situation, ou pour des raisons de défense dans un cas où il n'a pas le temps devant lui pour étudier le problème.

"L’apprentissage appliqué," c’est la capacité d'utiliser les connaissances accumulées pour découvrir de nouvelles situations. Cette capacité ne se produit que lorsque le cerveau des oiseaux atteint un seuil minimum d'apprentissage. Les oiseaux qui n’ont jamais volé quand ils étaient bébés (à la période optimale pour apprendre à le faire) demeurent dits "à faible fonctionnement" parce qu’ils sont incapables de "penser rapidement".

Ces oiseaux doivent utiliser des réseaux de compensation. L'une des plus courantes de ces manœuvres de compensation (plusieurs personnes en ont fait l'expérience), c’est… "quand j’ai peur, je mords d’abord et j’avise plus tard".

De plus et non négligeable… les oiseaux qui ne peuvent voler pendant de longues périodes (que ce soit parce qu’ils ont les plumes de vol taillées ou sont confinés à la cage) auront des muscles atrophiés et peuvent courir un risque accru d'obésité, de maladie cardiaque et de maladie du foie en raison du manque d'exercice.

Un oiseau dont le vol est restreint n’a que très peu de choix ou de contrôle dans sa vie, ce qui entraîne du stress et de ces nombreux problèmes psychologiques que je rencontre régulièrement dans ma pratique.

Tailler les plumes de vol de son perroquet est bien plus sérieux que de dire que "c’est un choix personnel". Vous préjudiciez beaucoup plus que son besoin de voler, c’est sa vie entière que vous compromettez!

Il n’y a aucun avantage ni pour nous ni pour l’oiseau de lui tailler les plumes de vol...

 

 

© Johanne Vaillancourt 2021

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